La Poupée de Chiffon

Il était une fois, une petite fille qui avait une poupée de chiffon. Elle l’adorait et jouait tout le temps avec elle depuis sa plus tendre enfance.

Seulement, le jour où la petite fille eut cinq ans, sa mère lui offrit une poupée de cire.

La petite fille, folle de joie, abandonna alors la poupée de chiffon et l’oublia dans la caisse à jouets.

***

La poupée de cire, qui dormait à présent dans le lit de la petite fille, dit un soir à la poupée de chiffon :

– Maintenant c’est moi sa préférée, car je suis une vraie poupée. Toi, tu n’as aucune forme. Tu n’as ni vrais yeux, ni vrais cheveux.

La poupée de chiffon reconnut que tout cela était vrai et en fut très attristée.

Les jours suivants, elle regarda avec mélancolie la petite fille dorloter la poupée de cire et inventer des histoires avec elle.

***

Lorsque la petite fille eut six ans, sa mère lui offrit une nouvelle poupée, une poupée de porcelaine.

Comme la poupée de porcelaine et la poupée de cire se ressemblaient beaucoup, la petite fille joua avec les deux et les aima pareillement.

Chaque nuit, les deux poupées se disputaient pour savoir laquelle était la plus jolie et la préférée de la petite fille. Et elles finissaient toujours par dire :

–  Ce qui est sûr, c’est que nous sommes bien plus belles que la poupée de chiffon. La petite fille nous préférera toujours à elle.

La poupée de chiffon faisait mine de ne pas les entendre, mais son chagrin n’en était que plus grand.

***

Un matin, la petite fille posa la poupée de cire et la poupée de porcelaine sur sa coiffeuse. Seulement, elle plaça la poupée de cire bien trop près d’une bougie et la poupée de porcelaine bien trop près du rebord.

Le visage de la poupée de cire commença alors à fondre.

Lorsqu’elle s’en aperçut, la petite fille l’attrapa brusquement pour l’éloigner de la flamme. Mais, dans son geste brusque, elle heurta la poupée de porcelaine qui était trop près du rebord. Celle-ci tomba et se brisa la tête sur le sol.

En voyant ses deux poupées défigurées, la petite fille se mit à pleurer et appela sa mère :

–  J’ai cassé mes poupées… sanglota la petite fille.

–  Ces poupées sont très fragiles, c’est pourquoi elles se sont cassées, expliqua la mère. Mais ne t’en fais pas, je vais les réparer.

–  Si elles sont trop fragiles pour que je puisse jouer avec, alors je ne veux plus y toucher, dit la petite fille.

***

La mère remodela au mieux le visage de la poupée de cire et recolla les morceaux de la poupée de porcelaine. Puis, elle installa une vitrine au mur de la chambre et plaça les deux poupées à l’intérieur.

La petite fille fouilla dans la caisse à jouets pour retrouver la poupée de chiffon. Elle l’attrapa, la dépoussiéra et lui dit :

– Toi au moins je n’aurai jamais peur de te casser.

La petite fille joua alors avec la poupée de chiffon toute son enfance et ne la remplaça plus jamais.

Quant à la poupée de cire et à la poupée de porcelaine, elles ne purent que les regarder s’amuser du haut de la vitrine et passèrent leur temps à se disputer pour savoir laquelle avait le visage le moins disgracieux.

Jusqu’au jour où elles se chamaillèrent tant que la vitrine s’effondra, et qu’elles se brisèrent en si petits morceaux qu’il fut impossible de les réparer.

Fin

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